mardi 16 septembre 2014

Le Road-Trip grec : Quelques pensées sur la route des Météores

En repartant de Céphalonie, je passais à la véritable destination de ce voyage, la raison qui m'avait poussé à prendre la route à moins de deux semaines de mon retour en France : Les Météores. 

Pour ce faire, il me fallait d'abord retourner à Patras, prendre un autre ferry jusqu'à Igoumenitsa, au nord de la côte Ouest, pas très loin de la frontière avec l'Albanie. De là, prendre le bus, avec un changement à Ioannina, jusqu'à Kalambaka, au pieds des Météores. Simple comme bonjour.

Un phare de la côte nord du Péloponnèse.
En plus, ça a commencé assez bien puisque de retour à Patras, je rencontrai un groupe de volontaires de Xylokastro, en visite avec des amis, avec qui j'ai pu passer quelques heures puisque mon ferry partait au beau milieu de la nuit. Du coup, pas le temps de m'ennuyer ou même de déprimer tout seul dans une ville qui n'avait plus grand chose à m'offrir de neuf ou d'exaltant, je passais un bon moment et embarquais pour un voyage de nuit le long de la côte Ouest (et personne ne chantera ce générique). Je n'avais pas de cabine, donc comme pour Santorin, le plan c'était de trouver un coin pour m'allonger, fut-ce sous un escalier, et roupiller un minimum histoire de ne pas être complètement HS le lendemain - surtout que bon, y avait des bus à prendre en territoire inconnu, autant être frais et alerte. Je trouve un petit restaurant dont le service est déjà fini et qui n’est plus qu'un bar pour la nuit, je demande au barman si je peux prendre une des banquettes et il me dit oui, pas de problème, non sans m'avoir remercié d'avoir demandé au préalable. J'imagine que d'habitude les gens y vont cash et sans gêne... Quoi qu'il en soit, les banquettes moelleuses du restaurant me font un chouette lit et je m'endors comme une souche. 

Le lendemain, je me réveille avec les bruissements du café qui s'anime, et il fait déjà bien jour. Une voix annonce dans les haut-parleurs que les gens qui descendent à Igoumenitsa doivent le faire maintenant et je me rends compte que le bateau est à quai - depuis quand ? - et que je dois me dépêcher de débarquer si je ne veux pas me retrouver...

"Prochain stop : Venise."

Alors là je vais être honnête, quand j'ai entendu que le ferry allait voguer jusqu'à Venise, j'ai sérieusement considéré la possibilité de faire semblant de dormir et de prétendre avoir manqué l'arrêt. J'étais sur un bateau en direction de Venise. VENISE. Je commençais déjà à élaborer des plans, à envisager les options, estimer le tarif d'un ticket retour Venise - Igoumenitsa, histoire de faire un "simple détour". Les gens débarquaient sur le quai, je les voyais par les baies vitrées, les secondes filaient, je devais me décider... Et puis j'ai analysé le truc vite fait : J'ignorais combien le billet retour me coûterait, et le surcoût pouvait s'avérer problématique. Et si quoi que ce soit devait se produire, et que je me retrouvais à appeler Efthimios et/ou mes parents pour des raisons administratives/financières, je me voyais mal expliquer :

"Hé, je suis à Venise, j'ai un problème."

Donc, par pragmatisme, j'ai couru vers la passerelle et je suis descendu, comme prévu, à Igoumenitsa. Et sincèrement, il m'est arrivé de le regretter, surtout après d'autres expériences de voyage chaotiques et qui ont pourtant bien fini. J'aurais probablement pu faire le détour à Venise, rester dans une auberge de jeunesse et reprendre vers les Météores, en demandant un petit extra à mes parents, qui auraient probablement compris l’opportunité. Venise, quoi... Mais d'un autre côté, si j'avais fait cela, je serai rentré au moins trois jours plus tard, probablement quatre (le bateau arriverait tard), ne me laissant que quelques jours avant de repartir vers la France. Je n'aurais donc pas été là pour la "nuit blanche pour voir se lever le soleil" ni les soirées d'adieu qui ont suivi pour les volontaires qui partaient juste avant moi. Or, c'est durant cette nuit blanche et ces soirées que j'ai appris à connaître Ada, qui ne vivait pas dans mon appart et que je n'aurais pas vraiment vu autrement, rencontre qui m'a fait changer mon plan d'étudier en Allemagne au profit de la Finlande.

Donc en fait, si j'avais décidé de faire ce petit extra vénitien de quelques jours, je n'aurais pas rencontré Ada et ne serais pas parti étudier en Finlande, où je vis maintenant depuis 3 ans. C'est dire si ça ne tient pas à grand chose, parfois.

Débarqué à Igoumenitsa, je me restaure chez Goody's (la meilleure chaîne de fast-food dans laquelle j'ai mangé jusqu'ici, dont les burgers sont fait avec du vrai pain et de la garniture fraîche, qu'on peut se faire servir en assiette) et reprend la route dans un bus blindé de monde et surchauffé, avec un changement à Ioannina. Alors, Ioanninna, j'ai pas fait la grotte qui n’est pourtant pas trop loin, vu que je revenais de Céphalonie et que bon, j'avais hâte de profiter de Météora. Faire une étape de plus pour une autre grotte ne m'emballait pas spécialement. En revanche, entre deux bus, l'attente était assez longue, et j'ai fait un tour dans quelques boutiques pour passer le temps et acheter à boire. Et c'est là qu'il m’est arrivé cette autre anecdote que j'évoque assez souvent, à savoir que j'ai trouvé des contrefaçon Adidas (avec l'étiquette Fruits of the Loom bien visible) mélangés à des T-shirt apparemment authentiques, et pas dans une boutique de souvenir bon marché, mais dans une vraie boutique de vêtements avec des autocollants de marques sur les vitrines et tout. Sans honte et sans scrupules (à mettre dans la même catégorie que les mecs qui t'abordent dans toutes les grandes villes pour te vendre les Ray-Ban pour une poignée d'euros en te jurant "original, original".) En fait, c'est là qu'on se rend compte à quel point les Grecs se moquent de la contrefaçon, dans une société où tout est apparences. Tout le monde porte des fringues de marques, des Ray-Ban, etc., dans une société où tout le monde souffre de la crise et personne n'est vraiment riche, en dehors d'une élite qui n'a pas oublié d'être conne quand elle en avait l'occasion est s'est bien engraissée. Si on pourrait arguer que les Grecs vivent au-dessus de leurs moyens, c'est surtout que tout ce bling-bling est faux, c'est du toc, de la poudre aux yeux. La contrefaçon est littéralement partout, et tout le monde le sait. Personne ne pense que vous portez des tonnes de vêtements de riches, personne n’est dupe de ce manège car tout le monde joue le jeu, et l'important, c’est d'avoir l'air riche et bling-bling. On s'achètera plusieurs paires de chaussures en carton (littéralement, parfois) dans les "chinese shop" - souvent plus indiens que chinois, d'ailleurs - plutôt que d'investir en une fois dans des chaussures d'allure moins chic mais plus solides. C'est une société du paraître poussée au-delà du ridicule, puisqu'on continue à s'accrocher aux marques tant que ça fait riche sur les selfies, alors que tout un chacun sait que tout cela vaut 10 euros des chaussettes au polo.

Je quitte Ioannina avec excitation : le prochain arrêt est le bon. Il fait une chaleur de four et le soleil inonde de soleil la moindre ruelle quand je descends du bus, et à ma grande surprise, je suis quasiment le seul. Les rues de Kalambaka sont pratiquement désertes, les magasins semblent tous fermés et si quelques enseignes indiquent clairement des cafés ou des restaurants, je ne vois aucun hôtel. Je fais plusieurs rues, rien, chou blanc. Alors que l'inquiétude commence à me gagner, j'essaye de me convaincre qu'un endroit pareil ne peut pas ne pas avoir d'hôtel ou de maison d'hôte, et que si tout est vite, c'est à cause de la sacro-sainte sieste - qui par cette chaleur me semble tout à fait justifiée. Je commence à sérieusement m'inquiéter quand soudain un solex s'arrête à ma hauteur, et un petit vieux sans casque me demande "Tu cherches un hôtel ? Pas cher !" "..oui..." Et il me fait signe de monter. C'est donc têtes nues dans la plus total insécurité routière (ne faites pas ça chez vous les enfants!) que nous remontons plusieurs rues sur sa mobylette antédiluvienne jusqu'à un petit hôtel bien caché au pied d'un pilier de pierre gigantesque et poli qui semble presque façonné plutôt que naturel. 

L'endroit est effectivement peu cher et très propre. Je paye ma chambre et dépose mes affaires avant d'explorer les environs, visitant le ville et admirant d'en bas les formidables formations des Météores, en tout cas une petite partie qui annonçait une visite d'envergure...

Il y a pire vue en arrivant en descendant du bus.
Tels des géants, les blocs des Météores montent la garde à Kalambaka.
On voit qu'ils habitent vraiment littéralement aux pieds des Météores.
La surface polie de ces structures de pierre est vraiment surprenante, on croirait qu'elle a été passé au papier de verre.
Au sommet de certains de ces immenses blocs de pierre aux formes étranges et polies qui sont déjà en soient une bonne raison de venir visiter l'endroit, se trouvent en effet des monastères orthodoxes. Construits en hauteur dans des recoins quasiment inaccessibles pour se protéger des invasions, notamment ottomanes, ces antiques monastères se visitent en remontant d'abord soit par sentiers sinueux soit par la navette de bus si on se sent pas trop chaud (haha, chaud, vous avez compris, hein...) pour le chemin raide en plein cagnard, puis des escaliers compliqués et étroits, des ponts-levis (!) et dans le passé des ascenseurs en bois - traction manuelle évidemment. Autant dire de véritables forteresses religieuses au beau milieu d'un site naturel déjà incroyable. Mais il se faisait déjà bien trop tard pour partir les visiter, du coup je me suis un peu reposé et j'ai mangé dans un restaurant où j'ai fait la connaissance d'un touriste Porto-Ricain qui faisait un Interrail dans l'"Europe pas chère" (Bloc Est + Grèce en gros). On a papoté et fait un tour de Kalambaka by night même si mon appareil photo n'a pas réussi à rendre quoi que ce soit de potable, ce fut une chouette rencontre (commencée sur une conversation basique : on s'est tout deux fendu de surprise et de reconnaissance devant l'hospitalité grecque quand le resto nous a offert à chacun une salade grecque, comme ça, parce que).

On se rend mieux compte de l'échelle monumentale, là.

Je suis donc allé me coucher tôt histoire de profiter de ce vrai lit et surtout pour être en forme le lendemain matin. Au programme, réveil à l'aube pour prendre la première navette et avoir un maximum de temps au sommet, pour visiter les monastères. Et j'ai bien fait de bien me reposer, car j'allais faire sous un soleil de plomb la plus belle visite qu'il m'ait été donné de faire en Grèce.

Haha, le gros cliffhanger ! Promis, au prochain article on grimpe voir ces chefs-d’œuvre.

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