mercredi 5 mars 2014

L'Islande au quotidien

Aujourd'hui un peu de culture du quotidien alors que se concluent les trois jours un peu spéciaux de leur période de Carnaval. Déjà, notons que depuis hier il neige à gros flocons, après deux semaines qui sentaient plutôt le retour du printemps. Finalement, on en remet une couche avec la neige et la glace, rock'n'roll ! De plus, nous sommes désormais en mars, ce qui veut dire que nous sommes le mois de la lutte contre le cancer. A cette occasion, les hommes se laissent pousser la barbe - ou au moins la moustache - en signe de solidarité, et les femmes portent des colliers ou des bracelets avec des moustaches. Même les bus portent des moustaches ! Apparemment, l'année dernière l'équipe de handball islandaise a heurté quelques sensibilités en débarquant face à l'équipe allemande qui a cru que leurs adversaires se moquaient de la moustache de leur... entraîneur.

(Haha, je suis sûr que vous avez cru voir venir un Point Godwin ! )

Mentionnons aussi qu'après deux semaines, je peux répondre à un grand dilemme qui me travaille depuis mon arrivée. D'un côté, les bienfaits de vivre sur une île volcanique recouverte de rivières, de glaciers et de sources chaudes, à savoir : Eau chaude et froid à volonté, directement tiré du sol, en illimité haut-débit, la totale. De l'autre, la contrepartie, à savoir : Cette fragrance délicate fortement associée au volcanisme résultant d'une présence perceptible de souffre.

Autrement connue sous le nom populaire "d’œuf pourri".

Oui, ouvrir le robinet revient à prendre une bouffée d'odeur d’œuf pourri, et quand je me brosse les dents et que je me penche au robinet pour me rincer la bouche, j'ai du mal à savoir si c’est seulement une odeur ou aussi un goût. Quand je bois l'eau du robinet dans un verre, ça va, mais prendre directement à la "source" n'est pas toujours des plus charmants. Et cette odeur flotte aussi dans l'air, parfois, sans que je puisse déterminer les facteurs qui font que aujourd'hui, oui, demain, seulement le matin, mais hier, non. Alors je vous le raconte par souci d'honnêteté, parce que ça ne se sent pas dans mes photos d'aurores boréales ou d'églises pittoresques.

Et les films / pubs d'agences de voyage se gardent bien de mentionner le facteur olfactif quand ils vantent les mérites de cette île au demeurant magnifique.

J'ai pesé le pour et le contre, et même si prendre une douche demande une certaine discipline sensorielle, j'ai conclue que ça ne me gênait pas. J'ai hésité longtemps, et j'espère m'y habituer bientôt et ne plus le sentir (une collègue islandaise me disait que ça lui faisait aussi quand elle rentrait de voyage), mais c'est supportable et je m'y fais petit à petit. Ce qui reste chiant avec l'eau c'est la vitesse incroyable avec laquelle l'argent vieilli... (mes bagues ont pris dix ans de patine en une semaine, si j'attends un peu je peux bientôt les vendre à des touristes façon Grèce en leur disant "original, original". Ils n'y verront que du feu)

Et c'était pas de l'industriel ! La thermos donne l'échelle :-p
Bref, maintenant que j'ai fait preuve de ma tempérance syndicale et évité l'habituel portrait idyllique qui va bien, retournons à nos moutons. Lundi fut le premier jour des Trois Jours Spéciaux, le Jour des Boules (et non, je ne ferai pas cette blague). Ce jour-là, tout le monde mange selon une thématique commune : la forme de boule. Boulettes de viande ou de poisson, et pâtisserie en forme de boule, une sorte de chou à la crème géant, LE dessert symbolique de cette journée. On s’empiffre donc, mais pas autant que le second jour où le grand truc c'est de manger du porc salé et de la soupe de haricots blancs. Le jour est appelé Jour de l’Éclatement, soi disant parce qu'on se goinfre à se faire éclater la panse. 

Mais je suspecte que ça ait plutôt un rapport avec la soupe.

La petite couche de confiture qui change tout !
Le troisième jour est plutôt un carnaval, on se déguise et on récupère des bonbons. Non pas lors de défilés, apparemment ça c'est pas leur truc, mais plutôt façon Halloween, en débarquant dans les kiosques et les boutiques vendant des bonbons et en chantant des chansons (plus rarement en rackettant les gens à la porte de leur domicile... mais y en a.). 

Et si vous pensez que ça ne fonctionne qu'avec les grands yeux sur-expressifs des petits enfants aux voix cristallines et innocentes, détrompez-vous. 

A l'unisson avec une collègue déguisée en Grominet (et moi portant un élégant chapeau qui n'était pas sans rappeler le goût exquis et irrésistiblement charmeur de Jack l’Éventreur) (preté par une de mes boss, je n'ai pas emporté ça en me disant "tiens, qu’est-ce que j'ai oublié de prendre pour partir en Islande ? Oh, bah un chapeau de carnaval, tiens !" Mais quelque part ça doit faire parti d'une sorte de tradition avec le chapeau de cow-boy en Grèce et feu mon chapeau nageur... puissent les courants du Sud-Savo le porter vers de meilleurs horizons), nous avons entonné Frère Jacques (elle en islandais, moi en français, le truc pas moche du tout) et... ÇA A MARCHÉ. J'ai eu un bonbon et deux rouleaux de réglisse/pâte d'amande (combo de la môôôôôrt), pareil pour elle et l'autre collègue qui a filmé la scène sur son portable ( la vidéo est sur Facebook mais je suis pas sûr que vous puissiez la voir si vous n'êtes pas "amis avec moi...).

La pause de midi qui a suivi m'a également permis de profiter d'un grand monument de la tradition culinaire islandaise : 

Le hot-dog.

Oui, je sais, c'est un peu décevant de prime abord. Parce que OK, ils ont des plats typiques (genre la tête de mouton, les testicules de moutons, le fameux requin à la chair toxique qu'on fait mariner dans le sol pendant quelques mois pour le rendre comestible... bref, de la vraie gastronomie) mais ils ont aussi des plats populaires, et rien dans ce domaine ne bat, dans le cœur des Islandais, le Hot-Dog. Il y a même un kiosque à Reykjavík dont on me parle à chaque fois que le sujet du hot-dog refait surface, où Cold-Play et même Bill Clinton lui-même ont mangé des hot-dog et dit qu'ils étaient bons.

Autant dire que si le Président des États Unis d’Amérique te dit que ton pays fait des bons hot-dogs, c'est comme être couronné par le Pape au Moyen-Âge : Le titre est à la fois incontestable et éternel. Gloria in Exelcis Calidis Canem*.

Parce que je ne suis pas un simple blog-bouffe et que je vous respecte, lecteurs, pour votre temps gaspillé sur cet article, je ne vous ferais pas l'offense de photographier un hot-dog, aussi bon soit-il, comme si c'était du jamais vu, alors pour compenser l'absence d'illustration appropriée, voici la vue de ma fenêtre quand les nuages se sont mis à rouler par-dessus la montagne.
J'ai également découvert un excellent vendeur de glaces (une visite au musée était prévue avec des handicapés du centre mais horaires d'hiver obligent......... grr.), un autre pilier des coutumes culinaires islandaises. Ces gens aiment les crèmes glacées. Beaucoup. De là à y voir l'originaire étymologique de leur pays, il n'y a qu'un pas que je ne franchirai évidemment pas. 

Mais quel heureux hasard, quand-même ?

D'ailleurs dans le même genre, ici France se dit Frakkland. Si vous avez vu la nouvelle version de Battlestar Galactica, vous savez probablement à quoi je pense. 

Coïncidence ? Je ne crois pas.


Prochain Point Culture du Quotidien : Le référendum volé sur l'Union Européenne, ou une belle leçon de civisme (de plus) made in Iceland.


Et comme ici on me demande beaucoup de comparer l'Islande et la Finlande (la France et l'Allemagne bizarrement ça les intéresse moins, alors que d'habitude "Aaah, France, Paris, Disneyland !"... mais aussi en Grèce, un petit vieux dans la montagne dans un Français approximatif " La France ? Ah, Sarkozy ! Fasciste !" Aaaah, 2010.) , je commence une petite série :

L'ISLANDE :

Contrairement à la Finlande : La mer ne gèle pas en hiver.

Comme en Finlande : Les films et séries ne sont pas doublés.

Contrairement à la Finlande : Ils se sentent obligé de faire des pauses au milieu des films. Au cinéma. Hérétiques.

Comme en Finlande : Ils aiment la réglisse...

Contrairement à la Finlande :... mais pas spécialement salée ^^

Comme en Finlande : Ils picolent comme des trous le week-end en achetant leur alcool dans une ligne de magasin à monopole façon Alko.

Contrairement à la Finlande : Ils savent moins se tenir quand ils le font. Plus nerveux, l'Islandais bourré, moins dépressif mais plus... réactif.

Comme en Finlande : Il y a des Français partout. PARTOUT.

Contrairement à la Finlande / Comme dans le reste de l'Europe outre la Finlande, apparemment : Ils sont choqués d'apprendre que le goudron, ça se boit, et ça se mange. Et que c'est super bon.



*Latinistes, on se calme, hein, c’est juste une blague. Cela dit, comme vous avez souffert devant des déclinaisons improbables et que mon apprentissage du Finnois m'a fait comprendre l'étendue de votre tourment, si vous voulez tout de même fructifier vos centaines d'heures de martyr en vous la pétant, allez-y. Faites-vous plaisir. C’est peut-être la seule fois que ça vous sera utile cette année, certes, mais c'est quand même la classe.

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