samedi 21 avril 2018

Flåm & Nærøyfjord

Les moutons sur la route, tranquilles.
Quand on visite un pays qui nous est, pour la plus grande partie, inconnu, on a tendance à se fier à l'avis des autres pour organiser ses étapes. On lit des articles sur le net, des guides de voyage, et puis on regarde ce qui revient souvent, et ce qui a plu aux voyageurs qui ont parcouru ces terres avant nous. Généralement, ça nous permet d'éviter les pièges et de savoir où on va. Au moins à peu près. Et quand la route pour s'y rendre dure plusieurs heures, ça permet de ne pas perdre son temps. En principe.

Et puis il y a Flåm.

Flåm. D'après les avis trouvés ici et là et d'après nos guides, c'est un petit patelin mignon planqué au fond d'un fjord d'où on peut prendre un bateau pour faire une ballade dans les fjords avoisinants. Un must ! C'est un peu loin de Bjørkheim mais bon, ça permet de voir du paysage sur la route, d'explorer la région, et puis un petit village mignon, hein, ça vaut le coup. Bon, il faut essayer d'avoir du bol et ne pas tomber sur l'afflux massif de touristes, nous sommes avertis, mais nous tentons notre chance.

Le trajet se passe bien, il fait même beau la plupart du temps, permettant d'apprécier les paysages somptueux du sud de la Norvège. Bon, faut certes pas avoir le mal des transports parce que ça serpente... beaucoup. Et faut pas avoir le vertige non plus, car certains lacets très étroits et très serrés se déroulent à flanc de montagne bien raide. Superbes vues sur les fjords, hein, pas de souci, mais les miquettes dès qu'on croise une caravane et qu'il faut serrer la vieille glissière de sécurité. Il faut également être vigilant, pour louvoyer entre les moutons étalés librement sur la route ou traversant sans trop se soucier des voitures. J'y pense parce que souvent les dits moutons s'allongent sur la route à l'ombre des glissières de sécurité, justement. Ah, et il faut aussi être nyctalope, parce que dans les (très nombreux) tunnels, il n'y avait presque jamais de lumières. Sérieux, dès qu'on s'est éloigné d'Oslo les tunnels étaient de moins en moins bien éclairés, jusqu'à être dans le noir complet, à l'exception de patchs réfléchissant la lumière des phares, pour ne pas se prendre le pan de roche dans la carrosserie. En ligne droite ça va, mais quand le tunnel tourne et serpente, c'est moyen quand même.



Bref, nous roulons au soleil et arrivons enfin à Flåm. Et là, vous l'avez deviné, c'est le drame.

Flåm est au bout de ce fjord !
Eviter l'afflux de touristes arrivant par bateau... ce conseil aurait déjà dû nous mettre la puce à l'oreille. Sauf que moi, j'imaginais des petits bateaux naviguant paisiblement dans les fjords, pas... l'énorme ferry. Et le petit village mignon, comment dire... Certes le village était petit, mais relativement quelconque, et surtout, c'est principalement une zone résidentielle. Dans un cadre magnifique, mais ça reste un village lambda, comme on en a traversé des tas sur le trajet. C'est le fait d'être encaissé dans le fjord qui rend l'endroit potentiellement intéressant, mais ça non plus ça n'est pas rare.

L'énorme parking / centre commercial qui accueille les touristes, en revanche, n'a rien de mignon. L'endroit est juste insoutenable : boutiques de souvenirs kitsch, ambiance station service et énorme parking où caracolent bus de voyage, caravanes et voitures dans un joyeux embouteillage pénible, et... c'est tout. Certes, le cadre est sympa, mais ce piège à touriste n'a pas grand chose d'autre à offrir. Comme en Grèce, on se retrouve à regarder vers le haut pour apprécier le paysage, en essayant de ne pas trop baisser le regard vers la triste réalité. Flåm fut la plus grosse déception de ce voyage, et sur le moment on était presque choqués du décalage entre les attentes causées par les recommandations et la dure réalité. Heureusement, on s'est vite repris. Sans nous attarder, nous avons décider de passer un tunnel de plus pour aller voir le fjord d'à côté, le Nærøyfjord, où l'un de nous avait repéré un sentier pour randonner jusqu'au sommet du fjord. C'était pas super bien indiqué (il a fallu un petit moment pour être sûr d'être dans la bonne direction pour le tunnel supplémentaire), les guides disaient que c'était... un fjord quoi, sans plus. Mais on s'est dit ça sera toujours mieux que Flåm. Et dieux qu'on a eu raison !

Le Nærøyfjord est vraiment juste à côté, mais c'est l'antithèse de Flåm. Pour la randonnée il faut d'abord faire le tour du fjord en passant par la petite ville de Gudvangen où nous ne nous sommes pas attardés. Nous avons continué jusqu'à Bakka, le village d'où part le sentier, qui a vraiment un certain charme, avec ses vieilles maison et son église toute mignonne. On retrouve le cadre naturel majestueux, sans les énormes ferry et le centre commercial. On y trouve ce qu'on est venu chercher, en fait!

Bon, faut commencer par le trouver, déjà. La route pour s'y rendre passe par un genre de chantier/carrière et ressemble juste au début d'un chemin forestier ou d'une voie privée, mais c’est bel et bien la bonne route, où deux voitures peinaient à se croiser, et où se trouvait un cheval. Qui, malgré la voiture de néerlandais bien embêtés qui attendaient figés derrière leur volant, n'avait aucune intention de bouger. Autant les moutons ça se contourne facilement et leur nature pleutre fait qu'ils dégagent assez vite de la route quand on s'approche. Autant le cheval, lui, s'il a décidé que le milieu de la route c'était l'endroit idéal pour passer le temps, rien à faire. Voyant que les gens devant nous ne comptent rien entreprendre, je sors, je tente de le prendre par la crinière, de le pousser, de lui tapoter le cul. Le cheval n'en a strictement rien à cirer. Céleste, qui s'y connaît en chevaux, lâche le volant, prend une baguette de bois dans le bas-côté et, par une technique qui s'apparente vraisemblablement à la magie, guide le cheval soudain docile hors du passage. C'est là que tu vois que l'expérience avec les animaux, ça ne s'improvise pas sur le bord d'une route norvégienne.

Ensuite on a grimpé tout le sentier jusqu'en haut sans problème, puis on est redescendus.

L'église de Bakka.
Sur le chemin du retour nous... Quoi ? Des détails ? Mais, euh... non, croyez-moi, tout s'est passé sans souci. Je n'ai pas craché mes poumons parce que le sentier était super raide et trois des quatre membres du groupes n'ont pas arrêté à mi-chemin. Qui vous a raconté ça ? Nous avons fait cette randonnée sans effort, ni suer des litres, et surtout, une fois arrivés en pleine forme physique et d'un moral d'acier à un promontoire qui semblait assez haut, nous n'avons pas du tout déchanté devant le petit panneau indicatif qui disait : "Vous n'en êtes qu'à la moitié, hihi, bisou."

Sans déconner, j'ai dû jurer au moins quinze fois que je me remettrai au sport. Avant d'attaquer la montée on commence par une petite bute tout à fait raisonnable. Mais dès que ça commence à grimper... Cette montée raide de bout en bout, quoi. On parle de 700 mètres de dénivelé en un peu moins de trois kilomètres, le sentier de l'enfer. Heureusement que y avait des arbres pour avoir un peu d'ombre, mais il faisait chaud, et il n'y avait pas vraiment de point d'eau pour remplir les gourdes vites vidées. Quand on n'a pas ou plus l'habitude, ce sentier est assez costaud. Plutôt que de faire un long sentier qui serpenterait de long en large pour avoir une pente raisonnable, le zig-zag part quasiment en ligne droite vers le sommet. C'est un sentier pour lequel les locaux ont dû demander de l'aide à des sherpas népalais qu'ils ont fait venir spécialement pour le tracer (et non, ce n'est pas une blague pour l'emphase. C'est véridique : il y a un petit panneau au pied du sentier qui explique son histoire. On y apprend également que malgré le niveau hardcore du sentier en question, y a un Norvégien qui se l'est tapé en descente, à cheval, de nuit, et bourré, et ça s'est très bien passé, merci pour lui. Ah, le Nord.). À l'époque ce sentier était utilisé pour les transhumances, ce qui veut dire qu'ils se le farcissaient avec leurs bêtes et leur bordel ! Une leçon d'humilité, telle une petite claque méprisante. Comme si le sentier t'en mettait une en disant : "Et tu comptes faire quoi ? Hum ?"

À l'exception d'un courageux membre du groupe qui s'est tapé toute la montée, les trois autres sont donc redescendus un peu après la moitié. L'une d'entre nous s'était amoché le pied quelques jours plus tôt, et moi je m'étais amoché l'ego à peu près au premier tiers de la montée, je dirai à peu près au moment où on a croisé des Norvégiens qui faisaient le sentier en courant, bref, il fallait redescendre.

Au début tout va encore bien... C'est après que ça s'est compliqué.
Tu crois que tu touche au but, et le panneau te rie au nez. Tu n'en es qu'à la moitié, loser ! 
Est-ce que malgré mes jurons et mon autoflagellation sur la baisse de ma forme physique j'ai tout de même apprécié le Nærøyfjord ? Absolument ! C'est un endroit magnifique, qui se mérite (long trajet potentiel, et le sentier, si on veut prendre un peu de hauteur), mais oui, à faire, sans hésitation. Et puis manger des glaces au fond d'un fjord après avoir galéré sur un sentier pentu, c'est pas mal, quand même (on oublie vite l'effort, c'est déjà ça !).


Sur le chemin du retour, à Gudvangen, on est passé devant un marché viking qui fermait malheureusement ses portes. Si d'aventure vous passez par le Nærøyfjord, regardez si le marché n'a pas lieu en même temps et à quelle heure il ferme, ça fait probablement un bon combo avec la randonnée nature dans ce cadre exceptionnel.

Et là, pour augmenter le trafic sur mon blog enfin, je veux dire, pour le plaisir de vos yeux, chers lecteurs, une série de photos du Nærøyfjord :


Vue d'une petite plage où nous avons pic-niqué.
C'est raide et ça se voit. Ah et le sentier ne serpente pas en longs va-et-vient, hein. Il part quasiment la verticale.
Voilà un petit village qui a du charme !
Là on commence à monter, pas encore trop d'arbres pour obstruer la vue.
Un peu plus haut, vue depuis une trouée dans les arbres. On notera qu'ici les bateaux à touristes ne sont pas d'énormes ferry.
Ce paysage me rappelle tellement l'Islande. Mais avec des arbres.
Petit promontoire pendant la descente, on voit que le temps se couvre.
Encore une fois, les chutes me rappellent énormément l'Islande. Il y a vraiment eu une connexion mentale entre les deux pays, dans ma tête, indépendamment de leur histoire commune, évidemment. Les paysages des deux pays sont vraiment à couper le souffle.
Vue du fond du fjord, à Gudvangen, près du parking de la station service à côté de laquelle fermait le marché viking.
PS : Aucune photo de Flåm. Flåm c'est décevant, n'y allez pas.

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